Résidence Niepce

J’ai vu Barton Fink des frères Coen il y a plusieurs années. De l’histoire, je ne me souviens plus vraiment. Un écrivain new-yorkais se perd à Hollywood, c’est à peu près tout ce qui me revient. En revanche, l’hôtel où il descend: son papier peint surchargé, sa chaleur dorée, son groom filiforme et inquiétant, son envoûtement obsolète… Tout cela est resté imprimé dans ma mémoire. L’hôtel Earle est un personnage, un des acteurs principaux. Je pense aussi aux couloirs interminables de l’Overlook Hotel dans Shining, aux reflets froids et luxueux des vitres du Park Hyatt de Lost in Translation, à la salle de restaurant boisée de l’hôtel de la Plage des Vacances de monsieur Hulot.

J’ai voulu donner au Saint Georges le même genre de rôle. Faire de lui à la fois le cocon et la trame d’un récit. Réputé pour sa table, installé dans un bâtiment historique du XIXème siècle, à cinq minutes à pied du centre de Chalon-sur-Saône, c’est une institution locale – tout Chalonnais a sa propre image du Saint-Georges. Dans le même temps, il reste suffisamment ouvert, plastique, extensible – un mobilier moderne, des murs gris ou blancs – pour devenir un terrain de jeu propice à toutes les transformations.

L’hôtel est en haut du casting, mais il n’est pas le seul comédien. On retrouve, à égalité, une galerie d’apparitions qui peuplent ses chambres, salles de réunion, balcons, cuisines, couloirs. Tous apportent une énigme ou un indice, leur pierre à l’édifice.

C’est peut-être un thriller, un film fantastique, une comédie dramatique. Chacun est libre de s’inventer l’histoire de ce livre, comme chacun de ceux qui sont venus poser m’ont confié un morceau de leur imaginaire. J’ai posé des questions, je ne connais pas les réponses.

Série issue de la Résidence au Musée Nicéphore Niépce, Chalon-sur-Saône, 2016.